La Parabole du macaroni et l’esprit de sacrifice: réponse à Martineau

Dans sa réplique aux étudiantes et étudiants publiée son blogue le samedi 24 mars, Richard Martineau a su résumer en deux phrases l’essentiel d’un conflit intergénérationnel :

« Or, je persiste et signe. Quand jétais étudiant, je navais pas les moyens daller manger sur la terrasse dun resto chic dOutremont. On vivait à 5 dans un appartement minable et on mangeait du macaroni. Et je navais pas les moyens de macheter les gadgets de lépoque. Je me suis serré la ceinture, jai INVESTI dans mon avenir, et aujourdhui, je suis heureux davoir fait ces SACRIFICES. »

Cette parabole du macaroni et des sacrifices, elle m’a été servie de nombreuses fois par mon père (sauf que dans son cas, c’était des toasts au beurre de pinottes.) Dans le temps, des dires même du paternel, la population étudiante était pour la grande majorité jeune et sans le sou. Issue de familles nombreuses et de milieux très modestes, elle n’a pu compter pour financer ses études d’aucun autre soutien que celui que le gouvernement d’alors avait jugé bon d’instaurer, sous la forme de prêts et bourses couvrant de misère ses besoins de base.

Ses études terminées, mon père a reconduit ce même esprit de sacrifice dans sa carrière. Le plus clair de mon enfance, il a fait le sacrifice de sa vie de famille pour monter une entreprise qui, bien qu’elle lui bouffa 6 jours de sa semaine pendant plus de 10 ans (le 7e, il dormait…), nous sortirait éventuellement tous du besoin. Ma mère a pour sa part fait le sacrifice de son autonomie financière et de son épanouissement professionnel, en grande partie parce que la garderie était hors de portée du budget familial. Motivés par le désir de nous donner mieux que ce qu’ils avaient reçu eux mêmes, mes parents se sont investis et ont fait des sacrifices pour nous assurer, à ma sœur et moi, un avenir meilleur.

Ces générations (les boomers et les X, pour faire dans les catégories) ont effectivement mangé plus que leur part de macaroni pour se sortir de leur condition de pauvreté. Dans le Québec émergent post 1967, c’était ce qu’il y avait de plus digne à faire. Ces sacrifices consentis étaient alors porteurs de promesses et de sens parce qu’ils permettait réellement, à qui en avait la chance et s’en donnait la peine, d’améliorer sensiblement ses conditions de vie. Ces hommes et ces femmes ont en bonne partie réussi, et nous leur devons pour cela admiration et respect.

Self made man exemplaire, mon père a su me transmettre l’amour du travail et la valeur de l’effort. Je dois à ces valeurs transmises, ainsi qu’à l’appui financier familial (dont je n’ai par ailleurs jamais abusé, trop consciente, voire vaguement honteuse, de dépenser l’argent durement gagné) d’avoir poursuivi jusqu’aux cycles supérieurs mes études postsecondaires.

***

Le statut d’étudiant couvre aujourd’hui des réalités sociales complexes; la majorité travaille à temps partiel alors il n’est pas rare pour des travailleurs de tous domaines de souscrire à la formation continue. Les parents étudiants sont nombreux, les familles monoparentales aussi. Il y a des quarantenards en réorientation de carrière, des retraités qui veulent se garder l’esprit aiguisé… Les études n’ont plus grand chose à voir avec une étape de vie bien cadrée concernant une population dans la 20aine cheminant vers la vie « adulte » de travailleurs actifs.

J’ai passé les huit dernières années de ma vie dans l’université, partageant mon temps entre les études et et le travail (précaire) d’assistance à l’enseignement et à la recherche. Je suis également devenue maman au début de la maîtrise. Foi de mère-étudiante-travailleuse, aucune instance gouvernementale sensée soutenir l’accès aux études et/ou les nouvelles familles n’est réellement adaptée à la complexité des situations où peuvent se retrouver les étudiantes et les étudiants aujourd’hui. Le Programme de prêts et bourses (conçu pour le modèle étudiant des années 1980), comme le Régime québécois d’assurance parentale (conçu pour des travailleurs 9 à 5), sont des instances qui ne se parlent pas entre elles, alors qu’elles sont impliquées de concert dans la situation financière de milliers de personnes et de leurs familles.

Vous parlerai-je de ces quelques 7000$ durement gagnés en bourses d’excellence, pour lesquelles j’ai tout donné pendant le BAC (foutue moyenne!), et qui m’ont été retranchés cette année sur les Prêts et bourses gouvernementaux parce que j’ai eu le malheur de gagner plus de 12 000$ en 2011? (Pour l’année en cours, la carte de crédit couvre le gouffre financier.) Vous parlerai-je de toutes ces bourses d’excellence (environ 80% des offres) auxquelles j’étais inadmissible parce que j’ai eu le malheur de commencer la maîtrise à temps partiel pour cause de maternité? (Malgré un dossier académique exemplaire, un cheminement atypique est une garantie de non reconnaissance au sein des structures universitaires.) Vous parlerai-je, enfin, de ces quelques 600$ que m’a réclamé le Régime québécois d’assurance parentale parce que j’ai osé travailler une poignée d’heures réparties sur trois mois en même temps que je recevais des prestations de nouvelle maman? Prestations qui, soit dit en passant, sont calculées dans les mêmes proportions pour tout revenu annuel de 50 000$ et moins… Juste pour le plaisir de l’exercice, vous calculerez 55% d’un salaire hebdomadaire pour un revenu annuel de 8000$, pour voir combien ça paye de macaronis… Heureuse d’être encore à deux pour parer solidairement aux absurdités du système, car ces mesures de « soutien », qui ont fortement tendance à s’annuler les unes les autres, maintiennent même les plus avisé.e.s dans une précarité financière constante.

Mais il y a pire. Les professeur.e.s sont de plus en plus nombreux et nombreuses à dénoncer la mauvaise gestion et le mal-financement des universités. Les tâches bureaucratiques paralysent les activités d’enseignement. Des millions de dollars sont accordés à la recherche alors que des professeurs, libérés de leurs obligations, s’occupent à gérer des sommes astronomiques en subventions de recherche à l’extérieur de la communauté universitaire, souvent aux profits d’intérêts privés à peine déguisés. Ajoutez à cela toutes les bêtises cumulées par le gouvernement en place, qui vend à rabais les ressources naturelles, se fout des urgences environnementales, impose des taxes sur la santé, fait des cadeaux fiscaux aux entreprises, offre des contrats sans appel d’offre… Ça sent le copinage, le conflit d’intérêt. Ça sent fort. Même que ça empeste…

D’un côté ces tristes clowns nous servent des sermons peu crédibles, alors que de l’autre se multiplient les études, les expertises, les avis indépendants soutenant qu’un bon ménage de nos institutions (la fin des chaînes de privilèges et de la corruption) et une meilleure redistribution de la richesse (plus de paliers d’imposition, une meilleure gestion de nos ressources naturelles, la taxation responsable des entreprises) suffiraient largement à couvrir la gratuité scolaire, l’accès à la santé, voire tous les programmes sociaux confondus.

Et l’on vient nous haranguer à propos de la nécessité de faire des sacrifices et d’investir dans notre avenir. On nous dit, non sans condescendance, que nos cheminements n’auront pas de valeur à moins que nous ne gagnons ce que nous avons à force de souffrances et de renoncement. Le problème est précisément là : faire des sacrifices en tant qu’étudiant dans les années 80-90, c’était porteur de sens. Faire des sacrifices pour faire plaisir à ce gouvernement vendu, corrompu et clos sur lui même, alors qu’année après année, les riches continuent s’enrichir, s’appropriant sous le couvert du privé la richesse collective tout en répandant comme une évidence la rhétorique du manque (les fameuses parts de gâteau, ou ces bouts de « couverte » que chacun tire de son bord), cela n’a absolument aucun sens.

***

Je trouve ignoble que la réalité d’étudiants plus aisés festoyant sur les terrasses chic d’Outremont vienne masquer celle, beaucoup plus commune, d’étudiants-parents-travailleur surnageant session après session dans l’absurdité bureaucratique et la précarité financière qu’elle engendre. Hier comme aujourd’hui, les étudiants pauvres, seuls ou en famille, restent chez eux et font des sacrifices. Ils ont en fait le choix entre manger du macaroni ou combiner dans des proportions destructrices travail et études. Dans les deux cas, ils se ruinent la santé physique et psychologique au nom d’une hypocrite nécessité qui ne profite finalement qu’aux mieux nantis. Et ils ne sont pas seuls dans cette condition aliénante : allez demander à tous ces travailleurs et travailleuses désillusionnés, dépossédés de la moindre prise sur leurs conditions de travail, peut être même aux portes du burn-out, si les sacrifices auxquels on leur demande de consentir leur donnent l’impression d’investir dans leur avenir.

Dans la foulée de la Révolution tranquille, la réforme de l’université et le programme de prêts et bourses mis en place par le gouvernement avait pour objectif premier de soutenir par le moyen de l’éducation le développement et le bien-être général de la société québécoise. Il est navrant de constater qu’aujourd’hui, beaucoup de celles et de ceux qui ont bénéficié de ce soutien de leur propre société se désolidarisent de ceux qui les ont suivis, arguant qu’ils ne souffrent pas assez pour avoir le droit de se plaindre. Je vois mal pourtant comment une personne constamment placée en position de survie, assurée d’être endettée plus de la moitié de sa vie (après le prêt étudiant viendra l’hypothèque…), peut constituer une richesse pour sa société. Avec la parabole du macaroni et l’esprit de sacrifice qu’elle prône, c’est tout le projet d’amélioration du monde pour les générations futures qui est foulé aux pieds.

En définitive, il me semble plus qu’approprié de parler de parabole en ce qui concerne les macaronis de Martineau. Il y a dans cette valeur immense accordée au sacrifice un relent de religiosité catholique qui consacre la valeur des réalisation impliquant peine, souffrance et abnégation. Jésus, ce fier sémite révolutionnaire, n’a-t-il pas souffert sur la croix pour nous sauver tous? J’imagine pourtant mal notre Sauveur revenir à Pâques dire à ses apôtres que leurs efforts pour aider les plus démunis ne valent rien, à moins qu’ils n’aillent se faire crucifier eux aussi.

Le jour où le gouvernement aura fait ses devoirs de transparence, de responsabilité et de redistribution solidaire de la richesse, le jour où les riches (les particuliers comme les entreprises) feront eux aussi leur juste part, le jour où nous gérerons respectueusement nos richesses collectives en les considérant pour ce qu’elles sont vraiment : le patrimoine des générations à venir, alors je promets solennellement de consentir dans la joie à tous les sacrifices nécessaires pour soutenir l’épanouissement de ma société. D’ici là, je veux pouvoir vivre sainement, prendre le temps qu’il faut pour être vraiment présente auprès de mon enfant, m’impliquer bénévolement dans ma communauté, partager de bon cœur et sans compter le peu que j’ai et nourrir mes amitiés, celles qui restent quand le soutien de l’État fout le camp, parce que ce sont à mes yeux les moyens les plus sûrs d’investir réellement dans mon avenir et celui des miens.

Je ne servirai pas la parabole du macaroni à ma fille. En fait, je ne lui souhaite rien de moins qu’une existence plus douce que la mienne, plus stable et moins stressante, plus épanouie. Avec un peu de chance, peut-être arriverai-je à lui partager l’amour du travail et la valeur de l’effort qui m’ont été légués, de sorte qu’elle puisse un jour trouver autant de fierté et de plaisir que moi à faire de son mieux. En lui donnant l’exemple, peut-être même arriverai-je à lui transmettre un certain sens de la solidarité et de la responsabilité qui lui fera voir toute la pertinence et l’importance d’oeuvrer au bien-être de celles et ceux qui viendront après elle, malgré les difficultés et les sacrifices.

Émilie Dazé, citoyenne québécoise contre la hausse et POUR UN CHANGEMENT SOCIAL GLOBAL

Catégories : Grève générale 2012, Politique et société | Mots-clés : , , , | 29 commentaires

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29 avis sur « La Parabole du macaroni et l’esprit de sacrifice: réponse à Martineau »

  1. Je connais 2 des 5 « étudiants » vus par « Moulin à parole » Martineau…

    En fait, il n’y avait qu’une seule étudiante dans le groupe…

    Les autres affichaient le carré rouge par solidarité…

    • Je suis de tout cœur avec vous Émilie. Étant un artiste, je comprends très bien votre condition. À la différence que je me suis contenté de vivre seul dans un minuscule 3 1/2 afin d’éviter ce que vous affrontez avec courage. J’ai 54 ans et j’ai tenté de retourner aux études, mais je ne pouvais pas me payer ce «luxe». Je ne mangerai jamais sur une terrasse à Outremont, je préfère personnellement le macaroni, car, le prix de pouvoir manger sur une terrasse à Outremont est de se mettre à genoux devant des gens qui me méprise.

      Pierre Mailloux, citoyen québécois contre la hausse et POUR UN CHANGEMENT SOCIAL GLOBAL

      • Francine Metthé

        Pierre Mailloux acteurs et ex comédien des Trouve à Rire peut-être………je suis solidaire…..

    • Joëlle Basque

      Comme tu connais les « étudiants » de la terrasse, peux-tu leur dire qu’Infoman les cherche:
      http://blogues.radio-canada.ca/infoman/2012/04/02/etudiants-recherches/

      Très bon article, très pertinent et très juste.

    • Nicolas

      Infoman est à la recherche de ces personnes…

    • Marie-Ève Fournelle

      Infoman à la recherche des fameux étudiants sur la terrasse: http://blogues.radio-canada.ca/infoman/2012/04/02/etudiants-recherches/

      Excellent texte, par ailleurs. Bravo.

  2. Ping : Des mots bien pesés | Profs au carré

  3. Audrey Fortin-Lepage

    Cette lettre doit être envoyée à Martineau, Beauchamp et Charest, si ce n’est pas déjà fait.

    Éloquent.

  4. jonathanquesnel

    Superbe! Juste et touchant.

  5. Eh bien! Voilà qui est dit. Je pense que le plus important, c’est de souligner qu’en effet les choses évoluent, que les modèles doivent s’adapter aux nouvelles réalités. Pour la morale du sacrifice, on repassera.

  6. Laureen Moock -Colombani

    MERCI ! J’ai des jumeaux de 18 mois, j’effectue depuis septembre 2011 un retour aux études en deuxième cycle, je bénéficie de prêts et bourses histoire de maintenir la tête hors de l’eau et mon chum est l’unique véritable soutien de famille…et il vient de sciences humaines… ALORS MERCI ! PARCE QUE C’EST EN EFFET PAS SI SIMPLE PHYSIQUEMENT ET PSYCHOLOGIQUEMENT.
    Je souhaite à mes fils un monde plus équitable avec une vraie répartition des richesses. Je compte bien les éduquer dans le respect de ces valeurs quitte à sacrifier ma session d’hiver 2012 afin de montrer que le mouvement ne s’essouffle pas.

  7. Sharpie Douce

    Et vlan dans les dents!! C’est à ça que ça sert l’éducation : à réfléchir, à communiquer une pensée et à CHANGER CE QUI DOIT ÊTRE CHANGÉ dans notre société!!!!!! Merci Madame Dazé!

  8. Démie

    Ce qui me choque le plus dans l’histoire « que les jeunes ont pleins de gadgets électroniques », c’est que, dans plusieurs cas, ce sont les études qui les réclament. Avant, on pouvait se satisfaire de papiers, stylos et « liquid-paper », mais déjà il y a 15-17 ans, on nous exigeait de remettre nos travaux écrits par ordinateur. Aujourd’hui, il faut un courriel pour avoir accès à son « compte étudiant ». Donc, ce n’est pas tant un caprice des jeunes, mais une réalité du XXIe siècle.

    Pour le reste, c’est pas tout le monde qui a « tous les gadgets ». Tous ceux et celles qui sont encore dans les livres imprimés semblent passer inaperçus à côté de ceux qui s’en permettent plus (ou qui reçoivent des cadeaux « plus dispendieux » à Noël). Côté sacrifice, j’ai dû tout arrêter aussi. Je dois faire partie des « pauvres qui n’iront pas à l’Université, de peur de ne pas pouvoir rembourser plus tard »; sauf que le choix a été fait 2½ ans AVANT l’annonce des hausses…

  9. Très beau texte sur lequel je suis d’accord. Cependant, je ne trouve pas qu’il s’enligne directement avec les revendications des étudiants grévistes. Ce n’est pas contre la hausse de frais directement qu’il faut s’en prendre, mais pour une nouvelle « révolution tranquille », un changement en profondeur qui va bien au-delà d’une simple hausse.

    Je crois que la société québécoise est prête pour un vrai changement, les dernières élections le montrent. Mais il faut la volonté politique pour y accéder (selon moi). Peut-être que cette volonté se trouvera parmi les prochains diplômés que je suis prêt à suivre (même si je suis un terrible X qui est pour la hausse aujourd’hui).

  10. Andreanne

    Tres bien dit! Toutefois, ce qui semble ressortir le plus dans le texte, ce n’est pas tant le desaccord contre la hausse des frais d’etudes, mais bien le manque de soutiens du gourvenement. C’est peut-etre par la qu’il faudrait s’orienter pour les greves…

  11. Quand j’étais étudiant, les dénigreurs-à-la-Martineau s’indignaient du grand nombre de voitures sur les campus, preuve irréfutable, selon eux, que les étudiants se plaignaient pour rien. Point commun avec son histoire de terrasse aujourd’hui: prendre l’échantillon le plus biaisé qu’on puisse trouver, et en tirer des généralisations.

    Ça va à l’encontre de tout ce qu’on enseigne dans les écoles de journalisme, en plus d’être anti-scientifique et démagogique. Seule consolation: on n’enseignera jamais du Martineau dans les écoles de journalisme.

    • Mario Taillon

      Personnellement j’ai déjà habité Outremont et j’ai déjà vu des jeunes aisés qui fréquentaient réguliêrement des terrasses d’Outremont, et certains tout le temps.

      Je peux dire que ces jeunes aisés que j’ai parfois connu, en général cherchaient par tous les moyens dont ils disposaient, un groupe de référence, ils cherchaient à devenir des gens de la classe moyenne sans le pouvoir, pour avoir quelque chose en commun avec d’autres. Et non pas être les exceptions qu’ils avaient étés toute leur vie …

      La description de Martineau des jeunes qu’il a vu sur une terrasse à Outremont avec leur petit carré rouge pourrait très bien correspondre à celle que je viens de faire.

      « On voit bien ce qu’on veut voir… » l’adage peut très bien s’appliquer, et ce, même pour Martineau.

  12. Louis Boucher

    Très bon texte, que madame Beauchamp ainsi que messieurs Martineau et Charest auraient intérêt à lire et à méditer. À madame la ministre de l’Éducation, qui disait aux étudiants qui avaient manifesté sur un pont, ralentissant du coup la circulation, d’arrêter d’« écoeurer les travailleurs qui paient leurs études », je suis tenté de rétorquer : « Et vous, Madame, arrêter d’écoeurer ceux et celles qui paieront demain les pensions de ces travailleurs! »

  13. Louis Boucher

    Très bon texte, que madame Beauchamp ainsi que messieurs Martineau et Charest auraient intérêt à lire et à méditer. À madame la ministre de l’Éducation, qui disait aux étudiants qui avaient manifesté sur un pont, ralentissant du coup la circulation, d’arrêter d’« écoeurer les travailleurs qui paient leurs études », je suis tenté de rétorquer : « Et vous, Madame, arrêtez d’écoeurer ceux et celles qui paieront demain les pensions de ces travailleurs! »

  14. Bravo Émilie!
    Tout-à-fait d’accord.

    PS Éric Senterre, tu te dis pour un changement global « en profondeur » mais tu es pour la hausse? Parles-tu ici d’un changement en profondeur du prix du pétrole à mettre dans ton 4×4?

  15. Mario Taillon

    Martineau aurait intérêt à ne pas regarder uniquement son beau gros nombril adoré et regarder un peu autour de lui avant de porter des jugements.

    Mais il est peut-être trop occupé pour avoir du temps pour étayer ses jugements.

    Aujourd’hui c’est pas parce que quelqu’un a un iPad que son avenir est assuré. C’est pas parce qu’il va dîner sur une terrasse à Outremont non plus.

    Demain matin son emploi peut être allé s’envoler et avoir abouti aux Philippines ou ailleurs et les circonstances par lesquelles il ou elle a pu se payer ce luxe temporaire s’être envolées avec. En une fraction de seconde, exactement comme des mouvements de capitaux non taxés.

    C’est sûr que les conditions d’inégalité sociales ont créé une classe décorative qui ne fait rien et qui profite de toutes les irrégularités du système. Mais c’est pas diminuer l’accês à l’éducation qui va arranger ça. Loin de là, l’accessibilité aux études est le seul espoir de pouvoir corriger la situation un jour et c’est pour ça que Charest et le 1% essaient, sinon de l’abolir, du moins de le restreindre.

  16. patricia paquin

    Wow!
    Merci, je suis finissante au BAC, retour aux études après que mon poste fût coupé, monoparentale et dans les 40 et très pauvre. Je ne peux continuer au cycle supérieur, faute d’argent.
    Et j’ai connu cela, avoir gagné trop d’argent et me faire retirer presque en entier mes prêts. J’ai appris à mes dépends qu’à 12 ans, les enfants ne sont plus à notre « charge », 3 mois, aucun revenu et je leur dois plusieurs centaines de $, pour cela ma session, j’ai été coupé de moitié sur mes prêts.
    Il y a la famille et les amis une chance.
    Moi, je ne dis jamais sacrifice à mes enfants…qu’il soient heureux dans ce qu’ils vont faire et bien.

    Très juste ce que tu dis.

  17. Dans l’ensemble, je suis d’accord avec ce que vous dites. En particulier lorsque vous dénoncez – avec raison! – les dérapages cinglants de ce gouvernement en matière de gestion. Je pense d’ailleurs qu’il n’y a pas que les étudiants qui devraient manifester en ce moment!

    Cela dit, il est difficile de nier que plusieurs Québécois, qu’ils aillent à l’école ou non, n’ont pas le moindre sens des réalités. Pour plusieurs, voire même peut-être la majorité, le mot « gratuit » dans le contexte des services sociaux signifie que « c’est le gouvernement qui paie ».

    Ils ne semblent pas du tout réaliser que « l’argent du gouvernement » n’est pas le leur… mais le nôtre!

    Les Québécois auraient avantage à acquérir ne serait-ce qu’une base de connaissances en économie. D’abord, parce qu’ils voteraient probablement beaucoup plus intelligemment et contribueraient ainsi à tuer ce genre de conflits dans l’oeuf. Ensuite parce qu’il serait drôlement plus simple pour le parti au pouvoir de les servir correctement, car ils seraient aptes à comprendre les situations dans lesquelles ils se trouvent, et à mieux jauger les solutions proposées pour s’en sortir.

    Personnellement, je suis contre la hausse. Ce gouvernement ne donne aucune raison aux étudiants de croire qu’elle permettrait l’amélioration des services qui leur sont offerts.

    … mais je crois que l’absence de conscience sociale et économique des Québécois est dix fois plus alarmante.

    S’il y avait davantage de points de vue intelligents, objectifs et fondés, exposés clairement et proprement (d’ailleurs votre article est un bon exemple!), on aurait probablement plus de chances d’avoir le gouvernement qu’il nous faut.

    Mais hélas, tant que ce peuple n’aura pas le courage d’entendre la vérité, il sera mené par des menteurs. Tant qu’il proclâmera des slogans qui n’ont pas de sens et livrera des discours inaudibles, il sera mené par des sourds. Tant qu’il ne verra pas plus loin que sa propre cour, il sera mené par des égoïstes. Tant qu’il acceptera de tirer profit de la pollution, la misère et la souffrance tout en les dénonçant avec véhémence, il sera mené par des hypocrites.

    Tant qu’il refusera d’assumer sa part de responsabilités, il sera mené par des insouciants.

  18. Gérald Rousseau

    Toutes les institutions québécoises actuelles, ainsi que la cohésion sociale qui existait jadis s’effondrent lamentablement depuis une quarantaine d’années. Le gel, l’augmentation, la réduction ou l’élimination des droits de scolarité ne changeront rien à cela. Tout les pouvoirs en place (gouvernements, syndicats, establishement, etc) ne font que retarder cette effondrement en maintenant artificiellement debout les colonnes d’un temple qui craque de partout. On est sur le Titanic et on pense à le repeindre parce qu’on préfere ne pas voir qu’il coule.

  19. Nathalie Chartrand

    Je tiens à vous remercier, Madame Dazé pour cet excellent article! En tant que quarantenaire, maman d’une fille adolescente et étudiante à temps plein (oui, on mange du Kraft dinner) je devais vous écrire puisque vous avez réussi à mettre en parole ce que bon nombre d’entre nous ressente. Étant moi-même une décrocheuse, je connais l’importance d’une meilleure éducation et ce n’est pas seulement en paroles que j’encourage ma fille sur cette voie mais c’est aussi en actions. Donc, merci encore pour vos mots sur ce que je ressens et je partage sur mon FB!

  20. Je suis un ex-montréalais de 48 ans. Un « X » né à une époque où les jeunes étaient coinçés entre une génération qui a tout eut (les boomers) et une autre qui, une fois l’âge adulte atteint, la société recommença à offrir quelques perspectives d’avenir un peu plus potable, les boomers prenant leur retraite. Évidemment, lorsque les entreprises devaient choisir entre un gars dans la fin trentaine et un jeune fraichement diplômé, beaucoup d’entreprises de pointe choisissaient le plus jeune qui travaille pour moins cher et est plus facilement maléable. La génération « X » est dite sacrifiée pour des raisons évidentes.
    J’ai connu ça, moi aussi, la précarité financière mais surtout, l’incapacité à étudier sans obligation de travailler à temps partiel pour survivre. L’assimilation et l’intégration de la matière scolaire était à peine adéquate à cause de la fatigue; je vivais en zombie sur mon clavier d’ordi, tapant mes travaux sur Word Perfect 5.1. Croyez-moi, je n’avais ni les moyen$, ni l’énergie pour fréquenter les terrasses d’Outremont… sauf si on me payait la bière.

    Mon BAC ne remplissant pas ses promesses (perspectives d’embauche présumées), j’ai du travailler dans des postes sans rapport avec ma formation pour un salaire à peine plus enviable que le salaire minimum. J’ai encore un prêt étudiant impayé et je suis incapable de retourner me recycler à cause de ce prêt.

    Depuis les années 60, le fardeau fiscal qui était fournit à 70% par les entreprises et 30% par les particuliers, aujourd’hui, les entreprises ne fournissent plus que 25% et les particuliers 75%. Durant les années 60, un travailleur à salaire moyen faisait vivre sa femme, ses quatres enfants, se payait une voiture neuve tous les 5-7 ans environ et se payait des vacances à l’étranger aux 3 à 5 ans.

    Aujourd’d’hui, il faut un couple travaillant à temps plein pour arriver à faire vivre leur seul enfant. La voiture neuve est plus rare, les vacances sont plus modestes, plus rares et le prix des maisons est tel que l’hypothèque et les taxes sont souvent une source majeure d’anxiété, voire de faillite.

    En début de commentaire, je disais que je suis un ex-montréalais. J’habite maintenant en région car les loyers sont 35% à 40% moins chers. Je ne suis tout simplement plus capable de survivre à Montréal.

    Pendant ce temps, que dire de ces gouvernements qui achètent des avions de chasse F-35 pour jouer à la guerre et des sousmarins désuets et dangereux? Que dire de ces gouvernements qui font ou participent à des guerres afin de protéger les intérêts des puissantes pétrolières? Que dire de ces gouvernements comme celui d’Ottawa qui organisent des sommets économiques pour les riches, à coup de milliard en dollars, une somme collossale que les petits travailleurs doivent encore payer?

    Pendant ce temps, les riches que sont les pétrolières, les banques, les trusts, les cies d’assurance, les pharmaceutiques et les entreprises en biotech, bénéficient de généreux avantages fiscaux que les petits pauvres que nous sommes, financent sans jamais l’avoir consenti. Ces riches bénéficient de paradis fiscaux avec l’assentiment bienveillant des gouvernements qui font semblant de se sentir interpelés par l’évasion fiscale en harcelant et s’attaquant aux PME et aux 4% à 6% d’assistés sociaux qui font un peu d’argent au noir pour survivre. Des miettes lorsque l’on compare aux 25 milliard$ perdus annuellement par le gouvernement à cause de ces multinationales qui planquent NOTRE argent en Suisse, au Bahamas, au Lichtenstein ou autre paradis fiscaux.

    Ces riches parasites de la société nous offrent ensuite des produits et services exhorbitants que de moins en moins de gens sont capables de s’offrir. Ils manipulent les marchés pour plonger la planète entière dans des récessions économiques mondiales (2008). Et ils ont le culot par la suite de quémander encore plus d’argent pour les sauver de la faillite qu’ils ont eux-même provoquée!

    Lorsque j’entend ce gouvernement mafieux prétendre sans sourciller que les étudiants doivent payer « leur juste part », Je me dis qu’il y a de solide coup de pieds au cul qui se perdent!

  21. Denis Cadieux

    Bravo madame Dazé pour votre article, qui reflète très bien ma réalité d’artisan de la culture, monoparentale, et qui a inculqué des valeurs de justice sociale et de valorisation du travail à sa fille de 19 ans, cégèpienne qui suit passionnément la trace de son papa. Elle n’a pas eu peur d’afficher ses opinions que je partage, dans un cégep où les techniques sont concentrés et où 3 jours de grêve a fait tout un émoi. J’étais très fier de marcher à côté d’elle le 22 mars passé, avec tant d’autres parents, profs, et une jeunesse qui, tant qu’à moi, pour la plupart me donne beaucoup d’espoir, malgré le méchant gros nuage noir qui fait de l’ombre sur notre société avec nos 2 gouvernements autant à Ottawa qu’à Québec, qui multiplient les mensonges, les absurdités, et l’arrogance vis à vis une majorité de gens, au profit d’une minorité de profiteurs, bandits, et richissimes voleurs en cravate qui nous rit carrément en pleine face.

    Martineau est un épais, méprisant, opportuniste, qui malheureusement a beaucoup d’influence auprès de gens mal éduqués, qui saisissent mal les enjeux ici. L’éducation est un droit pour tous et non un privilège. Que mr. Martineau comprenne çà une fois pour toute de sa tour d’Ivoire d’Outremont lui-même! J’ai aussi partagé cet article sur mon facebook. Merci encore pour vos mots si justes et touchants.

  22. Ping : Les élixirs du creuzet » L’ordre engendre le chaos

  23. Superbe texte qui me rappelle ma vie d’étudiant…

    J’ai fait un retour aux études suite à une perte d’emploi et, comme j’étais endetté de mon précédent emploi et que j’avais travaillé toute l’année avant mon retour aux études, je n’avais que très peu de prèts et bourses. J’ai donc dû m’endetter auprès d’une institution financière et j’ai travaillé plus de 40h semaine, en même temps que l’école, de soir, de nuit et de fin de semaine. Je dormais environs un beau 8-10h par semaine.

    Après trois ans de ce régime, j’ai fait un épuisement professionnel (wow… un étudiant qui fait un épuisement professionnel…) qui m’a forcé à quitter les bancs d’école. Résultat: 15000$ de dettes suplémentaire et aucun diplôme….

    Je ne souhaite pas cette situation à personne. Le fait d’avoir vécu cette misère fait que je grince effectivement des dents lorsque je vois les étudiants arriver avec leur voiture neuve, le ipad, le cellulaire. Cependant, je sais que ce n’est qu’une minorité et que la majorité a déjà de la difficulté à arriver.

    Je suis totalement derrière vous et j’espère vraiment que toutes les menaces du gouvernement et des institutions scolaires ne vous arrêteront pas.

    Le Québec a besoin, comme un autre lecteur le disait, d’une nouvelle révolution tranquille. Vous avez ouvert la marche, maintenant, c’est à tout le Québec de vous suivre!

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